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Les oiseaux de la faiblesse

« De formidables fesses … Je ne l’ai pas très bien dessinée au tableau, mais c’était pour vous donner une impression. C’est comme ça que se compose une Vénus préhistorique. Ça ne veut pas dire du tout ce que s’imaginent les paléontologues, soit qu’elles étaient comme ça. Le représentant de la représentation était pour eux autrement que pour nous. Ce n’était pas un ballon ou deux, ni non plus l’invocation des mamelles de Tirésias – envolez-vous, oiseaux de la faiblesse…Pour eux, le représentant de la représentation était assurément comme ça. Cela vous prouve que le représentant de la représentation peut différer selon les âges. » Lacan J., Le Séminaire, livre XVIII, D’un Autre à l’autre, Paris, Seuil, 2006, p. 228.

Lacan dessine une Vénus préhistorique pour nous en donner une impression, soit une empreinte qui échappe au raisonnement puisque l’objet est irreprésentable. À l’aube de la sublimation : deux-cent quarante-quatre trésors du paléolithique, retrouvés de la Sibérie jusque l’Atlantique, semblent réduire la femme à ses appâts. Nommées Vénus, par analogie à la déesse, on en rêve selon les canons de la beauté d’une époque. Nomination, indice du rêve du paléontologue : Vénus impudique pour la première découverte, Vénus de Lespugue, Vénus de Moravany, Venus de Willendorf…La Dame de Brassempouy, fait exception parce que cette représentation réaliste de visage humain, la plus ancienne, est sans bouche et sans corps ! Mais une fois les oiseaux de la faiblesse envolés, comment savoir si cette représentation est homme ou femme ?