Que Lacan se soit toujours voulu freudien se vérifie aussi et surtout à propos de la femme, surtout si elle n’existe pas. Il a pu dire ne la trouver nulle part ailleurs que dans le mythe freudien de Totem et Tabou, où elle procède du père primitif qui possèderait toutes les femmes – ce que Lacan qualifie d’« impensable » ou encore de signe manifeste d’impossibilité 1.
Son inexistence lui confère un être pourtant très insistant, puisque l’on ne parle jamais plus que de ce qui n’existe pas – sirènes, licornes, sorcières, ondines, etc., la liste est longue. « La femme n’existe pas » fait donc que tout le monde est fou.
Lacan n’a pas découragé sa recherche aux passionnés des deux sexes, mais il a choisi de l’orienter. C’est d’ailleurs par là qu’il ouvrit ses Écrits avec son « séminaire sur “La Lettre volée” ». Texte fascinant, le sien autant que celui de Poe, et qui le restera tant qu’il y aura des lecteurs, puisque l’on y apprend notamment que celle qui n’existe pas n’est pas sans substance, et que cet immense corps de femme est à portée de main pour peu que l’on sache la reconnaître…
1. Lacan J., Le Séminaire, livre xviii, D’un discours qui ne serait pas du semblant, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 2007, p. 106.